Plus de la moitié des personnes parties à la retraite entre juillet 2019 et juin 2020 avaient mal anticipé leur montant de pension

Études et résultats

N° 1285

Paru le 23/11/2023

Adèle Grondin (Drees)
La Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (DREES) publie une nouvelle étude portant sur la préparation du départ à la retraite et l’anticipation du montant de pension. Ces résultats sont issus de la cinquième vague de l'enquête "Motivation de départ à la retraite", qui vise à analyser les circonstances et les motivations qui ont conduit un échantillon représentatif de nouveaux retraités à prendre leur retraite. Cette étude se concentre spécifiquement sur un module relatif à la préparation de la retraite, interrogeant les nouveaux retraités sur divers aspects, notamment l'âge auquel ils ont commencé à envisager leur départ à la retraite, l’anticipation du montant de leur pension, leur satisfaction avant et après la retraite, ainsi que les regrets éventuels liés à leur choix de départ.

 

L’enquête Motivations de départ à la retraite est menée régulièrement auprès de personnes qui viennent de partir à la retraite. Elle est réalisée en partenariat avec le Conseil d’Orientation des Retraites, la Direction de la Sécurité sociale, et cinq régimes de retraite : le régime général, le régime complémentaire des salariés du secteur privé, les deux régimes de fonctionnaires, et la caisse de retraite des agents de la SNCF. Les quatre premières vagues de l’enquête ont été réalisée en 2010, 2012, 2014 et 2017. La dernière édition, dont sont issus les résultats présentés ici, s’est déroulée entre février et mai 2021 auprès de 5 400 personnes résidant en France et ayant liquidé leur retraite de droit direct dans l’un des quatre régimes de base entre le 1er juillet 2019 et le 30 juin 2020.

Les hommes anticipent davantage leur départ à la retraite que les femmes

Les personnes ayant liquidé leur retraite entre juillet 2019 et juin 2020 (hors départs pour invalidité et inaptitude) déclarent, en moyenne, avoir commencé à réfléchir sérieusement à leur départ à la retraite à l’âge de 58 ans et 5 mois en moyenne, soit environ 3 ans et 11 mois avant leur départ effectif à l’âge de 62 ans et 5 mois. Il s’agit toutefois d’une moyenne, qui recouvre des disparités en fonction de l’âge de départ, du genre ou encore du niveau de pension. En effet, toujours sur le champ des départs hors invalidité et inaptitude, l’anticipation des femmes est encore plus tardive en moyenne que celles des hommes (plus d’un an d’écart). Quant aux retraités situés dans le premier quartile de pension (les 25 % les plus modestes), ce sont ceux qui liquident en moyenne leurs droits le plus tard (à 64 ans en moyenne), et ils commencent à réfléchir à ce départ globalement plus en amont, environ 5 ans et 3 mois avant.

46 % des nouveaux liquidants ont correctement anticipé leur montant de pension

72 % des nouveaux retraités déclarent qu’ils avaient une idée précise ou approximative du montant de leur pension. Parmi eux, près des deux tiers (46 % de l’ensemble) ont finalement touché un montant à peu près équivalent à celui qui avait été anticipé, 20 % un montant moins élevé et 6 % un montant plus élevé.
Ce sont donc un peu plus de la moitié des nouveaux retraités qui n’ont pas ou qui ont mal estimé le niveau de leur future pension. Cela peut renvoyer à différents facteurs : niveau d’information reçue, complexité des règles de calcul dans les régimes d’affiliation ou d’autres particularités individuelles.

Le risque de mal anticiper son montant de pension est accentué notamment par une mauvaise information ou l’affiliation à plusieurs régimes

Le système de retraite français se caractérise par une grande fragmentation et par une complexité d’autant plus importante pour les assurés qu’ils ont été affiliés à plusieurs régimes dont les règles sont différentes. Il apparaît donc que ces assurés, dits polypensionnés, ont plus souvent tendance à mal estimer ou à ne pas pouvoir estimer du tout leur montant futur de pension. La complexité du système de retraite réside également dans la diversité des dispositifs existants et parfois méconnus, notamment en matière de solidarité.
Cependant, le principal facteur qui explique la non-anticipation du montant de pension demeure le niveau d’information. Toutes choses égales par ailleurs, une personne est 4 fois plus souvent dans la situation de n’avoir aucune idée du montant qu’elle percevra si elle s’estime mal informée, et 3,3 fois plus souvent de surestimer sa future pension. Malgré les dispositifs mis en place pour favoriser l’information des assurés, 24 % des retraités n’ont pas été satisfaits du niveau d’information dont ils ont bénéficié concernant leurs droits en matière de retraite.
Parmi les caractéristiques individuelles, les difficultés d’estimation sont plus souvent le fait des femmes, des ouvriers et des personnes modestes (situées dans le premier quartile de pension). A contrario, les cadres anticipent mieux leurs montants de pension.

Surestimer son montant de pension conduit plus souvent à une détérioration du niveau de satisfaction au moment de la retraite

Au moment de l’enquête, les personnes sont aussi interrogées sur l’évolution de leur satisfaction concernant la vie lors du passage à la retraite, par le biais d’une évaluation de leur niveau de satisfaction sur une échelle de 1 à 10 à deux étapes de leur vie : avant, puis après la liquidation des droits à la retraite.

Cette évolution de la satisfaction lors du passage à la retraite est en partie liée au fait de percevoir un montant de pension différent de celui qui avait été anticipé. Ainsi, les personnes qui avaient surestimé le montant de leur pension déclarent plus souvent voir leur niveau de satisfaction baisser, quel que soit leur niveau de satisfaction avant le départ à la retraite. 32 % des personnes ayant un niveau de satisfaction supérieur ou égal à 8 avant la retraite et ayant surestimé leur niveau de pension déclarent avoir vu leur satisfaction baisser contre 23 % de l’ensemble des retraités qui avaient un niveau de satisfaction élevé avant leur retraite. On observe le même constat pour celles qui n’avaient pas pu anticiper leur montant de pension.

Les retraités modestes regrettent plus souvent de ne pas être partis plus tard pour améliorer leur pension

Ces variations du niveau de satisfaction peuvent par ailleurs conduire les assurés à regretter, a posteriori, le choix de leur âge de départ : 21 % des assurés déclarent qu’avec le recul, ils auraient préféré partir plus tard afin de toucher une pension plus élevée, tandis que 5 % auraient préféré partir plus tôt, quitte à subir une perte de pension.

Les personnes regrettant de ne pas être parties à la retraite plus tardivement pour améliorer leur pension sont plus nombreuses parmi celles qui déclarent subir une détérioration de leur niveau de satisfaction. Regretter de ne pas être parti plus tard est aussi plus fréquemment le fait des personnes célibataires, notamment les femmes (27 %) et les personnes aux niveaux de pension relativement modestes (26 %).

Les ouvriers sont, quant à eux, plus nombreux que les cadres à subir une détérioration de leur satisfaction au moment du passage à la retraite (33 % contre 20 %). Pour autant, ils ne déclarent pas plus fréquemment regretter leur âge de départ que l’ensemble des assurés (21 % des cas). Ce paradoxe apparent renvoie au niveau de satisfaction avant la retraite, inférieur à 8 pour 63 % d’entre eux, contre 45 % pour l’ensemble et 38 % pour les cadres. En effet, 46 % d’entre eux déclarent que le fait d’avoir des problèmes de santé rendant le travail difficile a joué dans la décision de départ à la retraite, contre 18 % pour les cadres.

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