Crise sanitaire : hausse des syndromes dépressifs et des consultations pour ce motif

Paru le 12/03/2021

Résumé

Deux nouvelles études sur la hausse des syndromes dépressifs et des consultations dans le contexte de la crise sanitaire

 

La DREES publie deux études qui mettent en exergue la hausse des syndromes dépressifs et des consultations pour ce motif dans le contexte de crise sanitaire :

  • Une étude sur la santé mentale de la population française lors du premier confinement, qui analyse notamment l’évolution du syndrome dépressif dans la population générale et les différents facteurs de risque associés (DREES, Etudes & Résultats, 1185 ) ;
  • Une étude sur l’activité des médecins généralistes en novembre et décembre 2020 (DREES, Etudes & Résultats, 1186), qui montre une augmentation des demandes de soins liés aux questions de santé mentale.

Les jeunes et les femmes plus vulnérables face au syndrome dépressif

En mai 2020, 13,5 % des personnes âgées de 15 ans ou plus vivant en France1 déclarent des symptômes évocateurs d’un état dépressif, une proportion en hausse de 2,5 points par rapport à 2019. L’augmentation est plus marquée chez les femmes et les moins de 44 ans, et tout particulièrement chez les 15-24 ans. 22,0 % des jeunes de cette tranche d’âge déclarent ainsi des problèmes de ce type en mai 2020, contre 10,1 % en 2019 et 4,2 % en 2014. La proportion de jeunes présentant ce type de syndromes a donc plus que doublé en l’espace de 5 ans entre 2014 et 2019, puis à nouveau entre 2019 et mai 2020.

Un syndrome dépressif majeur, évocateur d’un épisode dépressif caractérisé modéré ou sévère, est détecté chez 5,3 % de la population.

 

 

Cette dégradation de la santé mentale en 2020 est également soulignée par les résultats du quatrième Panel d’observation des pratiques et conditions d’exercice en médecine générale, dans lequel les médecins interrogés déclarent une hausse des demandes de soins pour stress, troubles anxieux ou dépressifs en novembre et décembre 2020 : 72 % des médecins généralistes estiment ainsi que ces demandes sont plus fréquentes qu’à l’ordinaire et 16 % que le nombre de ces consultations a augmenté de plus de 50 % par rapport à la fréquence habituelle, avant le début de l’épidémie de Covid-19. La tendance, déjà observée lors de la première vague épidémique (55 % des médecins ont eu des demandes de soins liés à la santé mentale plus fréquentes durant le confinement du printemps 2020), s’accentue au fil du temps. Ceci traduit peut-être la persistance, au-delà de la première période de confinement, d’une souffrance psychologique marquée dans la population générale du fait des conséquences sociales et économiques de la pandémie et des mesures mises en place pour l’endiguer.

Par ailleurs, les médecins exerçant dans les zones où l’intensité épidémique est élevée constatent également un peu plus souvent une hausse des demandes de soins pour stress, troubles anxieux ou dépressifs (77 % des médecins exerçant dans les départements les plus touchés sont concernés, contre 71 % pour les autres médecins).

 

Une hausse de la perte d’intérêt à faire les choses, de l’humeur dépressive et des difficultés de concentration

Entre 2019 et mai 2020, quatre problèmes de santé mentale ont augmenté significativement dans la population générale :

  • le fait d’être triste, déprimé ou désespéré ;
  • la perte d’intérêt ou de plaisir à faire les choses ;
  • les difficultés de concentration ;
  • les difficultés liées au sommeil, qui concernent plus de la moitié des personnes interrogées.

Trois symptômes sont en recul :

  • la fatigue et le manque d’énergie ;
  • la mauvaise opinion de soi ;
  • le fait de bouger ou de parler lentement ou, au contraire, d’être agité.

Les problèmes liés à la nourriture (manque d’appétit ou hyperphagie) paraissent stables par rapport à 2019.

Par ailleurs, 21,7 % des parents interrogés déclarent que des difficultés liées au sommeil sont apparues ou ont augmenté depuis le début du confinement chez un de leur enfant de 3 à 17 ans.

Les syndromes dépressifs liés aux difficultés économiques, à l’état de santé et à l’adversité dans le foyer

Les facteurs les plus fortement associés à l’état dépressif sont notamment d’ordre économique. Les syndromes dépressifs frappent en effet un tiers des personnes en proie à une situation financière critique (qui « n’y arrivent pas sans faire de dettes »). Celles qui déclarent une situation financière « juste » ou « difficile » présentent également un sur-risque significatif de présenter un syndrome dépressif. Un état de santé dégradé et/ou la présence d’un handicap sont également des facteurs très associés à une symptomatologie dépressive, de même que les tensions ou violences conjugales.

Certaines caractéristiques individuelles associées à la détection d’un syndrome dépressif sont plus spécifiques à la période de pandémie. Ainsi, les personnes déclarant que leur situation financière s’est dégradée au cours du premier confinement (un quart des personnes de 15 ans ou plus) sont plus vulnérables, de même que les personnes ne disposant pas de jardin, de cour ou de balcon ou encore les personnes seules ou celles confinées en dehors de leur domicile habituel, chez leurs parents ou conjoint. Il existe également une forte corrélation entre l’état dépressif et la confiance accordée aux pouvoirs publics pour résoudre la crise, sans qu’il ne soit possible de déterminer le sens d’une éventuelle causalité.

Par ailleurs, le fait de déclarer des symptômes évocateurs de la Covid-192 est fortement lié à la détection d’un syndrome dépressif.

Sources et méthodes

L’étude sur la santé mentale de la population française lors du premier confinement se base sur les résultats des enquêtes EpiCov et EHIS.

L’enquête EpiCoV a été élaborée par l’Institut national de la santé et de la recherche médicale (Inserm) et la Direction de la recherche, des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), en collaboration avec Santé publique France et l’Institut national de la statistique et des études économiques (Insee) dans le contexte de la pandémie de Covid-19. Son objectif est d’estimer la dynamique de l’épidémie à un niveau national et départemental ainsi que d’étudier les répercussions du confinement et de l’épidémie sur les conditions de vie et la santé. 135 000 personnes âgées de 15 ans ou plus y ont répondu.

L’enquête de santé européenne EHIS est réalisée tous les six ans environ dans tous les pays de l’Union européenne.

Le quatrième Panel d’observation des pratiques et des conditions d’exercice en médecine générale est une enquête menée en France entière, hors Mayotte, par la Direction de la recherche des études, de l’évaluation et des statistiques (DREES), les Observatoires régionaux de la santé (ORS) et les Unions régionales des professions de santé-médecins libéraux (URPS-ML) des régions Provence-Alpes-Côte d’Azur et Pays de la Loire, auprès de 3 300 médecins généralistes libéraux, installés au 1er janvier 2018, ayant au moins 200 patients dont ils sont le médecin traitant et sans mode d’exercice particulier exclusif (comme homéopathe ou acupuncteur).

Cette vague d’enquête a été menée par internet entre le 24 novembre et le 27 décembre 2020, après 3 autres interrogations sur la crise sanitaire menées en 2020. Plus de 1 050 médecins y ont répondu.

 

1 France métropolitaine, Guadeloupe, Martinique et Réunion

2 Des troubles du goût ou de l’odorat ou de de la fièvre accompagnée d’au moins un des symptômes suivants : toux, difficultés respiratoires, douleurs thoraciques.


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