Le suicide et sa prévention

Paru le 10/09/2020

Résumé

Dans le cadre de travaux de l’Observatoire national du suicide (ONS), la Mission Recherche (MiRe) de la Drees a lancé en 2020 un appel à projets de recherche sur le suicide et sa prévention. Il avait pour objectif d’encourager et de financer la réalisation de travaux scientifiques sur les conduites suicidaires, en sciences humaines et sociales (sociologie, économie, démographie, gestion, sciences politiques, droit, histoire, sciences de la gestion, psychologie, etc.), en biostatistique ou en épidémiologie.

 

Trois axes ont été proposés :

  • Axe 1 : Spécificités des conduites suicidaires dans les départements et régions d’outre-mer (DROM) et les collectivités d’outre-mer (COM) français
  • Axe 2 : Dynamiques des conduites suicidaires chez les personnes âgées
  • Axe 3 : Pandémie de Covid-19 et conduites suicidaires

Au terme de cet appel, sept projets ont été financés :


Liste des projets retenus

 

Louis Jehel et Stéphane Amadéo : CHU de Martinique (DRCI)

Apport de l'autopsie psychologique à la compréhension des conduites suicidaires en Outre-mer (AUTOPSOM).

Ce projet vise à coordonner le monitorage des suicides dans quatre DROM-COM (Polynésie française, La Réunion, Guyane et Martinique) pour réaliser une étude systématique des conduites suicidaires en utilisant la méthode d'autopsie psychologique. Il combine plusieurs approches de sciences humaines et sociales (psychologie, anthropologie et psycholinguistique) pour réaliser des analyses quantitatives et qualitatives des données de monitorage du suicide, des trajectoires de vie, de la présence de trouble mental, ainsi que des analyses phénoménologiques interprétatives et psycholinguistiques. Cette étude innovante implique des équipes transdisciplinaires sur chaque site et va permettre d'initier une coordination du monitorage du suicide et d'identifier des spécificités socio-anthropologiques de conduite suicidaire entre et au sein des DROM-COM afin d'adapter les campagnes de prévention aux spécificités locales. Elle préfigure la création d'un observatoire des suicides en Outre-mer.

 

Sylvie Merle : Fédération nationale des observatoires régionaux de la santé (Fnors)

Regards croisés sur le suicide et les conduites suicidaires en Guadeloupe, Martinique, Guyane, La Réunion et Mayotte.

La Fnors et les ORS des cinq DROM proposent de réaliser un diagnostic interrégional pluri-thématique pour identifier les spécificités des conduites suicidaires dans les DROM. Afin d’identifier les similitudes et les différences interrégionales, la recherche s’articulera autour de quatre axes thématiques : dispositifs d’observation et de connaissances, facteurs de risques et déterminants, représentations et facteurs culturels, environnement sanitaire; et se scindera en deux phases.  La première consistera en une recherche et une veille bibliographique, la seconde donnera lieu à une enquête qualitative auprès des différents acteurs de champs d’action variés présents dans chacun des territoires. Les informations recueillies seront synthétisées selon chaque axe thématique et feront l’objet d’une analyse croisée entre les cinq territoires. Les résultats permettront d’identifier les besoins spécifiques ou communs à ces territoires et de définir des recommandations afin d’orienter les stratégies de prévention du suicide dans les DROM globalement et selon les particularités de chaque territoire ultramarin. La finalité est de disposer d’éléments permettant d’orienter les stratégies de prévention du suicide dans les DROM et celles spécifiques à chaque territoire.

 

Ingrid Voléry : Laboratoire Lorrain de Sciences Sociales (2L2S)

Mal-être au grand âge dans un contexte pandémique (Mal-âge).

L’objectif du projet « Mal-être au grand âge » est d’analyser les formes de mal être au grand âge révélées ou produites par la crise de la Covid 19. À partir d’une recherche qualitative s’appuyant sur une analyse documentaire et la conduite d’entretien avec des personnes âgées, il s’agit d’analyser l’expression du mal être par les personnes âgées elles-mêmes ainsi que son identification et son interprétation par des experts de niveaux d’intervention et de formation diverses. Les résultats attendus permettront de repérer la pluralité des formes et des dimensions de mal-être ainsi que leurs expressions pour repenser les politiques publiques du grand âge. L’étude de ces mal-être est plus large que la seule analyse des conduites suicidaires car elle vise à saisir des expériences subjectives et sociales jugées négatives qui, si elles ne conduisent pas toutes aux conduites suicidaires, peuvent en constituer un terreau. L’originalité du projet réside dans l’articulation entre, d’un côté, une étude des cadres sociaux dans lesquels le « mal-être des personnes âgées en contexte pandémique » a été formulé (analyse des récits politiques, médico-institutionnels, médiatiques) et, de l’autre, une analyse de la réception de ces cadres par les personnes âgées et de ses effets.

 

Mathilde Husky : Laboratoire de Psychologie EA4139, Université de Bordeaux

Impact de la crise sanitaire et socio-économique sur les conduites suicidaires chez les étudiants à l’université.

L’impact de l’épidémie sur les conduites suicidaires est susceptible d’être important à cause des multiples perturbations que ce contexte a pu impliquer pour les étudiants sur les aspects sociaux, universitaires et économiques. La prise en compte de facteurs pré-épidémiques permettra de mieux comprendre comment le contexte épidémique contribue à l’apparition de conduites suicidaires chez les étudiants. De nombreux travaux s’attachent actuellement à identifier l’impact de l’épidémie Covid-19 sur la santé mentale et suggèrent que cet impact délétère est déjà visible, notamment chez les jeunes. Les étudiants représentent une population vulnérable du fait des bouleversements impliqués par le contexte épidémique sur les enseignements, les examens, mais aussi concernant les relations sociales et leur situation économique. Ainsi un tel contexte pourrait fragiliser d’autant plus les étudiants déjà vulnérabilisés sur le plan psychologique ou socio-économique. Ce projet répond directement à la thématique de l’appel à projet alliant psychologie et économie pour identifier l’impact de l’épidémie sur les conduites suicidaires chez les étudiants. La force de cette étude réside dans l’existence d’une cohorte longitudinale en cours qui permettra de considérer la santé mentale pré-épidémique dans l’étude des perturbations subséquentes liées au contexte épidémique.

 

Christophe Tzourio : Bordeaux Population Health Research Center - INSERM U1219 Université de Bordeaux, Equipe Healthy

ECLIPSE : Épidémie à Coronavirus : Étude de L’Impact et des Profils à risque Suicidaire en population Étudiante. (financement DGOS)

Les étudiants, déjà vulnérables au risque suicidaire, se trouvent considérablement fragilisés par l’épidémie de COVID-19 du fait de leur isolement et des inquiétudes sur le déroulement de leurs études et sur leurs ressources financières. L’objectif du projet ECLIPSE est d’évaluer l’impact de l’épidémie sur le risque suicidaire chez les étudiants et spécifiquement : 1 : Décrire l’impact de l’épidémie et du confinement sur la santé mentale des étudiants et particulièrement les pensées suicidaires et leur évolution ; 2 : Identifier des profils à risque suicidaire dans ce contexte ; 3 : Analyser spécifiquement l’impact psychique de l’épidémie chez les étudiants en santé par une méthodologie mixte. L’hypothèse de l’impact à court et long terme de l’épidémie de COVID-19 et du confinement peut être majeur sur le risque suicidaire chez certains étudiants vulnérables, notamment les étudiants en santé. Ce projet pluridisciplinaire va déployer des méthodes complémentaires : analyse longitudinale de questionnaires existants, entretiens semi-dirigés, experience sampling method (ESM). Le but final est d'identifier les profils d’étudiants à risque, ce qui permettra d'intervenir en amont de la crise suicidaire et favoriser la réussite d'une réelle politique de prévention du suicide.

 

Alexandra Rouquette : Inserm U1018 - Centre d’Epidémiologie et Santé des Populations (CESP)

COVID-19 et risque suicidaire : études populationnelles pour informer les politiques de santé publique.

Les conséquences de la pandémie de Covid-19 pourraient augmenter le risque suicidaire dans la population, mais la faible qualité méthodologique des rares études existantes ne permet pas de conclusions valides. Le projet va décrire la prévalence et les facteurs de risque des idées et tentatives de suicide pendant ou au décours du premier confinement dans la population française en fonction de l’âge et du sexe en utilisant les données de l’étude représentative EPICOV. Il va aussi évaluer le rôle des troubles psychiatriques préexistants comme facteur modérateur de (exacerbant) l’effet des facteurs contextuels de stress liés à la pandémie sur la survenue d’idées et tentatives de suicide. Les résultats permettront de mieux comprendre si, et pour quels profils d’individus, les conséquences de la pandémie pourraient accroître le risque de suicide. La durée du projet est de deux ans avec des rapports intermédiaires à court terme.

 

Guillaume Vaiva : Lille Neurosciences et Cognition U1172 (Univ. Lille, Inserm, CHU Lille)

Impact du contexte pandémique de COVID-19 sur les conduites suicidaires et leur prise en charge (Projet IPACOS).

Les conséquences de la pandémie de COVID-19 et des mesures qui y sont associées sur la prévalence des troubles psychiatriques mais aussi sur les facteurs-clés associés au suicide (e.g. isolement social, précarité) ainsi que la réduction de l’accès aux soins psychiatriques au cours de la crise sanitaire font craindre une majoration des conduites suicidaires qui n’a actuellement fait l’objet d’aucune évaluation en France. L’objectif de cette étude est double : 1 : Analyser quantitativement l’impact de la pandémie et des mesures sanitaires sur les conduites suicidaires (tentative de suicide (TS) et décès par suicide) en population générale, et au sein d’une population particulièrement vulnérable (les personnes présentant un antécédent de TS). Pour ce faire, seront exploiter les données de VigilanS (dispositif de recontact incluant les personnes sortant d’un passage aux urgences ou d’une hospitalisation pour TS) sur une période de 3 ans débutant 1 an avant le 1er confinement ; 2 : Analyser qualitativement les difficultés de prise en charge des TS propres au contexte pandémique.

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